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Le haka néo-zélandais contre la marche LGBT

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 Tradition ou Modernité

En Nouvelle-Zélande, les explorateurs polynésiens ont accosté les premiers sur les plages du pays. Aujourd’hui, leurs descendants maoris représentent 14% de la population. Le concept tribal décline peu à peu, mais l’attachement aux valeurs spirituelles, à la solidarité et au respect des ancêtres perdure.

Le mélange des cultures ne s’est pas déroulé sans heurts. Mais Pahejas, c’est-à-dire Occidentaux, Maoris, Asiatiques, et minorités du Pacifique se considèrent comme des Néo-Zélandais à part entière: d’authentiques Kiwis.

Les Kiwis sont connus pour leur tempérament calme et leur amabilité. Le Haka des All Blacks, des rugbyman, danse guerrière des Maoris, est destiné à effrayer l’adversaire, mais il n’y a rien à craindre d’une population dont le taux de criminalité est l’un des plus faibles du monde.

Samedi 15 février 2025, à Auckland, à la bibliothèque de Te Atatu, une lecture pour enfants était animée par un drag-king, sur le thème de la formation des arcs-en-ciel et de la météo. L’événement a été interrompu lorsque des manifestants ont forcé l’entrée du bâtiment, brandissant des pancartes telles que "Non à la propagande Pride" ou "Il n’y a que deux genres".

Un peu plus tard, une cinquantaine de jeunes gens ont exécuté un haka pour s’opposer à la parade arc-en-ciel, à la marche des fiertés, à l’idéologie du genre, et aux activistes de la propagande LGBTIQA+. Ils ont choisi la méthode la plus traditionnelle qu’ils connaissent, le haka. Tradition contre modernité et dégénérescence. Passé contre présent et déliquescence.

Les trouble-fête arboraient un t-shirt Man Up, qui renvoie à une organisation bien précise, proche de la Destiny Church, l’église évangélique conservatrice néo-zélandaise. Une spécificité néo-zélandaise qui a beaucoup à voir avec la culture du peuple maori.

Aux antipodes de la déconstruction du mâle prônée dans les pays occidentaux, l’organisation se propose d’aider les hommes dans leur cheminement de guérison, en validant leur virilité, et en favorisant des liens positifs au sein des familles et des communautés. Pour être de meilleurs hommes, de meilleurs conjoints et de meilleurs pères.

Les gauchistes qui se passionnent pour l’Autre, pourvu qu’il ne soit pas blanc, qui fantasment le bon sauvage, qui vilipendent les traditions, poussent des cris d’orfraie. Les deux actions ont été fortement critiquées par les autorités. Les incidents ont conduit à une enquête de police.

L’église Destiny Church, dirigée par Brian Tamaki, a justifié son action en dénonçant un "agenda woke" et accusé les événements drag de "séduire les enfants vers un mode de vie queer".

Ces faits posent le problème de la tradition face à la modernité. Notre époque récuse le passé au profit exclusif du présent, de ses passions successives, voue un culte unique à la nouveauté. Le fugitif l’emporte sur le stable, toute tradition est délaissée,

La réalité première de l’homme est spirituelle. La pensée de la Tradition privilégie l’illumination spirituelle. Elle est donc anti-humaniste au sens de l’homme-Dieu de la Renaissance, antilibérale par anti-individualisme, et anti-rationaliste au sens de la raison humaine de Descartes.

La pensée de la Tradition suppose des principes universels et intemporels structurant les sociétés, principes indispensables pour permettre aux hommes de s’accomplir. La pensée de la tradition, foncièrement conservatrice, critique le monde moderne, ses errements et ses dérives, sans concession aucune.

Le conservatisme contre-révolutionnaire est un traditionalisme, la révolution étant entendue au sens de révolution, régression à des temps révolus. Les prétentions de la raison moderne sont insensées. On ne règle pas une société à coups de principes, la sagesse enseigne la modestie et la prudence, elle plaide pour la soumission à l’œuvre du temps.

L’homme est avant tout un héritier, il est débiteur de la société. Loin de naître libre comme le prétendait Rousseau, il naît impuissant et dépendant. L’enfant d’homme a besoin des autres hommes pour devenir un homme. Et il reçoit des autres, ses proches, ses contemporains, ses aïeux, sa langue, ses mœurs, l’essentiel de son savoir. L’acte fondateur de la vie sociale est conforme au "modèle de la nature", c’est la transmission. Chacun est un maillon dans la chaîne des générations, chacun est lié à tous les autres par la tradition. Gauchistes et mondialistes refusent la transmission, rejettent la tradition.

Le respect de l’héritage reçu s’allie au souci de l’héritage à transmettre. La communauté lie les vivants, les morts et ceux qui sont à naître.

La raison individuelle est faible et bornée, il faut s’en remettre à la sagesse de la tradition. Mais pourquoi faire crédit à la tradition? L’homme est limité par ses capacités et son expérience propre. Il ne peut pas penser par lui-même la complexité du social.

Des actions concrètes des hommes, du filtre du temps, des us et coutumes, naissent une connaissance et une sagesse expérimentales. L’histoire est à la fois sélection et agrégation, assemblage. L’histoire trie le bon grain de l’ivraie, elle accumule et transmet le bon grain.

La tradition est le fruit de ce processus, elle est liée et adaptée aux caractères particuliers de chaque peuple, aux données concrètes de sa vie, aux circonstances de son histoire. En ce sens, la tradition est irremplaçable.

Chaque peuple a sa formule propre qui dérive de son caractère national, des événements de son histoire. Une nation n’est pas une machine dont les éléments sont séparables et interchangeables. Elle est un tout organique qui a sa vie particulière.

La religion est une composante essentielle de la tradition. Les conservateurs traditionalistes ne sont pas tous des croyants ou des croyants fervents, mais tous insistent sur la fonction sociale de la religion. L’Eglise, du moins l’Eglise authentique, non l’Eglise de Bergoglio, est une autorité, maîtresse d’ordre et gardienne de la tradition. Une communauté, forte de ses rituels, de ses cérémonies et de ses fêtes. Dans Le Génie du christianisme, 1802, Chateaubriand souligne les aspects de la religion qui évoquent ou traduisent l’esprit communautaire de la pratique religieuse et sa dimension symbolique: la liturgie, les sacrements, la musique sacrée…

Conséquence. La religion qui s’accorde avec les thèses conservatrices est le catholicisme.

Le protestantisme met l’accent sur la foi individuelle et fait peu de cas dru rituel et de la liturgie, il ne remplit plus cette fonction d’intégration sociale. La Réforme a été un ferment destructeur, un jalon essentiel dans cette histoire qui a conduit au monde moderne.

Le conservatisme d’aujourd’hui a rompu avec la vieille tradition: la société aristocratique, "le trône et l’autel". Cependant, dans l’ordre social, il reste attaché à des usages et des coutumes qui lui paraissent en accord avec la nature et propres à cimenter la société: le respect de la famille traditionnelle (un papa, une maman et des enfants), le refus des genres multiples (un homme, une femme), l’hétérosexualité considérée comme naturelle, une instruction plutôt qu’une éducation, un enseignement du " récit national " afin de ne pas couper les générations nouvelles de leur passé, l’attachement à l’Eglise traditionnelle, incarnation de la tradition. La raison sociologique est toujours à l’œuvre, mais la raison historique a perdu de sa force.

La Révolution qui inspire le modèle républicain français a eu pour objet de réfuter la tradition. En effet, la tabula rasa de 1789 substitue l’autodétermination d’un individu doué de conscience et de raison aux déterminismes héréditaires, sociaux, culturels, corporatistes, linguistiques ou religieux. Sur le plan juridique, la coutume héritée des pratiques ancestrales est aussi révoquée au profit de la loi.

Ces idées révolutionnaires et leur traduction institutionnelle se sont progressivement installées dans le paysage hexagonal, et ont constitué une culture, un héritage, et donc une tradition française dite "républicaine". L’anti-tradition est devenue une tradition. Le terme n’apparaît pas toujours explicitement. Il lui est préféré des formules voisines, telles que "valeurs républicaines", "principes républicains", "modèle républicain", "front républicain".

Cette notion aboutit à une instrumentalisation politique, juridique et militante: on l’évoque à tort et à travers, on y met tout et son contraire. Ainsi, des défenseurs du multiculturalisme, partisans de politiques différentialistes, ethno-raciales, religieuses ou sexuelles, parfaitement contraires aux principes républicains, se réclament sans vergogne des " valeurs de la République " ou d’un " front républicain". Le juge administratif a fait de la tradition républicaine une notion fourre-tout qu’il instrumentalise à discrétion.

Gauchistes, mondialistes, et révolutionnaires vivent dans le présent, et récusent le passé, la tradition, les traditions. Dans notre société, la mode exerce son empire dans tous les domaines. Les modes vestimentaires lancées par des stylistes ou des vedettes.

Le langage: verlan, franglais, bouleversement de la syntaxe, dislocation de la phrase… Idolâtrie de la jeunesse, chirurgie esthétique, industrie cosmétique… Changement des habitudes alimentaires: alimentation rapide, surgelée, uniforme… Montée du divorce, déclin du mariage, avortement, euthanasie, eugénisme… Révolution sexuelle, mœurs débridées, homosexualisation, sexualisation des enfants, promotion du transgenrisme… Immigration, chance pour la France… Transhumanisme, épidémies et maladies soignées par la vaccination, responsabilité de l’homme dans un réchauffement climatique terrifiant, surveillance et contrôle permanents, triomphe de l’Intelligence Artificielle… Inversion des valeurs…

Ces phénomènes de société, l’engouement pour les modes, s’amplifient sous l’effet du grégarisme, auxiliaire de la convenance. Ces valeurs proviennent pour une large part des Etats-Unis et font partie de la culture de masse. L’Occident adopte ces valeurs facilement par mimétisme, par paresse intellectuelle, par snobisme, par volonté d’en finir avec le passé. La curiosité pour le nouveau, pour l’inédit, pour le jamais vu, est inhérent à la nature humaine.

Ainsi, la mode s’oppose à ce qui la précède. Le nouveau est ce qui n’est pas ancien, aussi les modèles du passé sont rejetés. André Gide conseille à un jeune de ne pas s’attarder sur le passé: "Ne cherche pas à remanger ce qu’ont digéré tes ancêtres. Vois s’envoler les grains ailés du platane comme s’ils comprenaient que l’ombre paternelle ne leur permet qu’étiolement et atrophie. Sache comprendre et l’éloigner le plus possible du passé".

Les développements considérables de la science, les progrès techniques entraînent une radicale modernisation de la vie, et aussi une uniformisation des coutumes.

De plus, l’amour du passé qui se nourrit d’une imagerie flatteuse risque de nous aliéner. Le respect excessif du passé peut dégénérer en culte. " Ah! Quand reviendra cet heureux temps? " se lamentent certains. Cette attitude est purement conservatrice. De vieilles pratiques inhumaines se pérennisent et prouvent la permanence d’un passé qu’on préférerait révolu: l’esclavage, l’excision des petites filles, la lapidation des femmes, la pédo-criminalité…

Mais nous tenons beaucoup de choses du passé, nous sommes des héritiers. La Grèce est la mère de notre civilisation. Nous devons trois legs essentiels à Rome: le sens de l’Etat, le droit, l’éducation par la langue, la littérature, la culture. Aux Temps féodaux, l’Occident naît et la civilisation occidentale se développe. Des temps féodaux à nos jours, des bouleversements politiques, sociaux, économiques, culturels, artistiques et sociétaux se multiplient et s’accélèrent.

Nous devons donc nous attacher au passé, aux traditions. Le bonheur de l’humanité est dans un passé plus ou moins reculé. Ernest Renan conseille l’étude du passé: "Tous les siècles d’une nation sont les feuillets d’un même livre. Les vrais hommes de progrès sont ceux qui ont pour point de départ un respect profond du passé. Tout ce que nous faisons, tout ce que nous sommes est l’aboutissement d’un travail séculaire".

Des contemporains continuent à chercher des modèles dans le passé: usage de la bicyclette, déjeuner naturel, produits biologiques, soins par les plantes, pain cuit à l’ancienne, retour aux sources du bon goût, lecture de classiques, retour de l’éthique, persistance des valeurs et des traditions anciennes, comme le haka en Nouvelle-Zélande, les crèches de Noël, la célébration des saints et des fêtes chrétiennes en France.

D’autant plus que les nouveautés révolutionnaires conduisent –toutes- à une impasse. Les modifications alimentaires, les épidémies à répétition, les injections géniques produisent la mort, le handicap. L’inversion des valeurs et les réformes sociétales conduisent à la décadence morale, à la déchéance humaine.

Le transhumanisme et l’Intelligence Artificielle modifient la nature de l’homme en profondeur. L’évolution du langage détruit la beauté de la langue française. La surveillance et le contrôle tuent les libertés fondamentales. L’action sur le climat peut engendrer des catastrophes irréversibles. L’immigration de masse déclenche un désastre pour la France.

L’héritage culturel peut constituer une vraie richesse, le passé est respectable, à condition de ne pas dégénérer en culte, de ne pas être motivé par le regret, par la nostalgie. Pour comprendre, aimer une oeuvre du passé, il faut s’initier au passé sans en faire une religion. Le passé est un réservoir de thèmes et de formes d’où peuvent sortir de grandes œuvres. Le patrimoine culturel assure à une nation, à une civilisation, son identité, sa permanence.

Rechercher le passé, c’est aussi prendre en compte le présent et l’avenir. La tradition est une composante culturelle. La recherche du passé est nécessaire à l’homme pour assumer sa propre culture. La plongée dans le passé peut nous donner une vision plus juste du concept de progrès. L’Histoire nous fait découvrir l’altérité, ce qui est autre.

La sacralisation du Nouveau et du Présent, la sacralisation du Passé et de la Tradition sont deux attitudes extrêmes et dangereuses. Le culte du Présent occulte une grande partie de la connaissance, du savoir, or, nous avons besoin de l’inutile et de l’inactuel.

La recherche du passé enseigne une certaine philosophie de la vie: un perpétuel recommencement, un mouvement pendulaire ou cyclique, la permanence de l’homme au milieu des vicissitudes de l’Histoire. Rechercher le passé, c’est aussi accepter de mûrir.

Et en matière de culte du passé et de la tradition, les gauchistes progressistes, révolutionnaires, mondialistes, montrent l’exemple. Leur état d’esprit purement conservateur consiste à voir systématiquement le bonheur de l’humanité dans un passé plus ou moins reculé. Ils reviennent au mythe de l’Arcadie, région de la Grèce antique où les poètes situaient légendairement le règne du bonheur et de l’innocence, ou mythe de l’Âge d’Or, dont le poète Hésiode parle en ces termes: "Sous le règne de Kronos, les hommes vivaient comme des dieux ; ils ne connaissaient ni le travail, ni la douleur…".

Jean Saunier

P.S.: Je laisse la responsabilité de ses dires à l'auteur (NDLR)

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